Par François BOISSIER, au congrès de la SFNV

ISSY-LES-MOULINEAUX (Hauts-de-Seine), 18 novembre 2021 (APMnews) – Le nouveau régime d’autorisation des activités de neuroradiologie interventionnelle qui devrait bientôt être publié comportera 2 niveaux, a-t-on appris mercredi au congrès de la Société française neurovasculaire (SFNV) à Issy-les-Moulineaux.

La neuroradiologie interventionnelle fait partie des activités dont la pratique est soumise à autorisation et dont les conditions d’autorisation sont révisées. Elle est une des premières dont le nouveau régime d’autorisation devrait être publié au Journal o`ciel, ce qui devrait intervenir de façon « imminente », a indiqué Céline Castellain-Jédor de la direction générale de l’offre de soins (DGOS) en présentant les grandes lignes mercredi devant les responsables de clière AVC des agences régionales de santé (ARS).

C’est issu d’un travail mené en 2018-2019, avec les sociétés savantes, et en réalité dès cn 2019 les travaux étaient achevés mais la crise du Covid-19 a conduit à prendre du retard dans la cnalisation.

Les enjeux principaux de cette réforme sont « la prise en compte de l’innovation et l’amélioration de l’organisation territoriale de soins », en « continuant à développer [le traitement interventionnel de l’AVC ischémique aigu par] thrombectomie mécanique pour en améliorer l’accès », tout en « renforçant la pertinence des pratiques, de la qualité et de la sécurité des soins », a précisé la représentante de la DGOS.

Le régime actuel d’autorisation des « activités interventionnelles par voie endovasculaire en neuroradiologie portant sur la région cervicocéphalique et médullorachidienne », qui date de 2007, comporte un seul niveau. Le seuil d’autorisation est de 80 interventions par an.

Le nouveau régime introduit dans le périmètre de nouvelles activités soumises à autorisation: des activités diagnostiques et des actes réalisés par voie percutanée. Et il distinguera 2 niveaux. Le niveau B concernera des centres ayant les capacités de réaliser l’ensemble des activités diagnostiques et thérapeutiques de neuroradiologie interventionnelle. Le niveau A concernera des structures réalisant uniquement la thrombectomie ainsi que les actes diagnostiques associés, dans le cadre de la prise en charge de l’AVC ischémique aigu.

Les centres des 2 niveaux devront disposer d’une unité des soins intensifs neurovasculaires (USINV) avec une expertise neurovasculaire sur place 24h/24 assurée par au moins un médecin neurologue ou un médecin ayant une expertise neurovasculaire, ainsi que des capacités de réanimation. En revanche, la présence sur le site d’une activité de neurochirurgie n’est indispensable que pour le niveau B.

Alors que les structures de niveau A devront disposer d’au moins une salle d’angiographie numérisée interventionnelle, pour celles de niveau B, il y aura une nécessité d’au moins 2 salles, dont une salle biplan.

Nouveaux seuils d’activité

Deux décrets vont être publiés sur les conditions d’autorisation, qui seront accompagnés d’un arrêté précisant les seuils d’activité. Ceux-ci seront de 60 thrombectomies par an pour les structures de niveau A et 140 interventions (soit les 80 interventions prévues dans le régime de 2007 et les 60 thrombectomies) pour les structures de niveau B.

Un autre élément nouveau est qu’alors qu’auparavant le niveau de régulation de ces autorisations était interrégional, désormais, avec la réforme des régions qui a conduit à la création de régions de plus grande taille, le niveau de régulation sera régional.

Interrogée sur la prise d’effet de ces textes, Céline Castellain-Jédor a indiqué la date de mi-2023, avec la mise en oeuvre des nouveaux projets régionaux de santé (PRS), dont l’élaboration par les ARS devrait débuter.

Vers 16 centres de niveau A

Jérôme Berge du CHU de Bordeaux, membre du bureau de la Société française de neuroradiologie (SFNR) a rappelé qu’il y avait actuellement 38 centres de neuroradiologie interventionnelle de niveau B, dans des CHU, et qu’avec le nouveau régime cela permettra à terme de créer 16 centres de niveau A dans des CH. Parmi ceux-ci, 6 sont d’ores et déjà ouverts, en province.

L’activité de thrombectomie a massivement augmenté en France ces dernières années, passant de 2.822 interventions en 2015 à 7.770 en 2019 et 7.189 en 2020 -un léger recul lié à la crise du Covid-19-, a-t-il indiqué.

Le spécialiste a montré qu’il existait dans plusieurs régions des zones insu`samment

couvertes, les centres actuels pratiquant la thrombectomie étant trop éloignés, qui justicaient l’autorisation de nouveaux centres.

En Ile-de-France, il y a 7 centres de neuroradiologie interventionnelle, mais… tous dans Paris intra-muros ou proche banlieue. Si cela ne pose pas de problème pour des patients de la petite couronne, peu éloignés, au contraire les délais de transfert des patients sont trop longs pour des patients de la grande couronne, qui parfois sont transférés dans les centres des régions voisines (à Rouen, Reims ou Tours) plutôt qu’à Paris.

Il y a en Ile-de-France un besoin de création de 4 centres pratiquant la thrombectomie. Sept centres ont candidaté, dont 2 en petite couronne à l’ouest de Paris- donc peu éloignés et moins prioritaires en termes de besoins- à Garches (Hauts-de-Seine) et Versailles, et 5 plus éloignés, à Mantes-la-Jolie (Yvelines), Pontoise, Meaux (Seine-et- Marne), au CH Sud-francilien (Essonne) et à Poissy (Yvelines).

En province, 12 centres sont prévus, dont 6 déjà ouverts à Bayonne (Pyrénées- Atlantiques), Pau, Vannes, Nîmes, Perpignan et Annecy, et 6 restant à ouvrir à Valenciennes (Nord), Boulogne (Pas-de-Calais), Valence, La Rochelle, Orléans et Bastia.

Ces centres de niveau A « se conçoivent dans le cadre d’un binôme avec le CHU de référence », notamment pour la formation, ainsi que dans une phase transitoire initiale de 6 mois pour la permanence des soins. De plus, le seuil devrait être à 45 interventions pour la 1re année d’activité.

Ces 12 nouveaux centres permettront de couvrir une population de 12 millions de personnes, a souligné Jérôme Berge. Il a souligné le fait que ces implantations concernent des territoires ayant un bassin de population important, et qui sont à une grande distance d’un CHU. « Il ne sert à rien d’ouvrir des centres dans des petites villes avec des bassins de population trop petits », a-t-il ajouté, notant que de toute façon on ne trouverait pas de praticien.

Lors de cette session, une personne dans l’assistance a regretté qu’il n’y ait pas de centre envisagé à Metz, estimant que malgré la faible distance avec Nancy qui possède un centre, d’une part le bassin de population de Metz est important, d’autre part dans les faits des patients frontaliers sont acheminés vers l’Allemagne ou le Luxembourg.

En outre-mer, il y a un centre de niveau B qui fonctionne bien à La Réunion. Dans les Antilles, un centre a été ouvert en Martinique, avec en 2020, par convention avec la SFNR, des présences de neuroradiologues venant de la métropole par rotations. Les patients de la Guadeloupe étaient transférés à la Martinique, mais avec une limite dans les possibilités de transfert liée principalement à la disponibilité de l’hélicoptère et des délais longs, comme l’a montré Annie Lanuzel.

Le CHU de la Martinique a recruté en novembre 2021 2 praticiens temps plein, et un 3e recrutement est en cours. De son côté, en Guadeloupe l’ARS a décidé de la création d’un centre; le transfert au CHU de Guadeloupe de la convention qui existait entre le CHU de Martinique et la SFNR est à l’étude.

Jérôme Berge a souligné en conclusion l’importance d’une clière de formation initiale et continue sur la thrombectomie, ainsi que les besoins en moyens humains -en médecins
formés mais aussi en paramédicaux, pour assurer une permanence 24h/24 7 j/7- et donc les besoins de postes.